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TARDI [JACQUES]
L’un des immenses rénovateurs de la bande dessinée contemporaine ! Quand je pense que j’ai eu la chance de collaborer très tôt avec lui, pour son premier album, Rumeurs sur le Rouergue, une fois de plus je me dis que j’ai été là au bon moment. Mais on portera je l’espère à mon crédit que — en vrai passionné de dessin — j’ai toujours eu l’œil attentif sur les nouveaux talents, hier comme aujourd’hui.

 

TECHNIQUE [DE TRAVAIL]
Comment dire ? Beaucoup de technique et beaucoup de travail ? L’essentiel, pour moi, se situe AVANT le scénario proprement dit. Je constitue des dossiers de presse sur de nombreux sujets qui m’intéressent. J’ai une vaste bibliothèque de travail où les ouvrages sur la faune et la flore côtoient les manuels de stratégie et les livres de sociologie, les recherches en urbanisme et les photos d’architecture… Je procède comme un journaliste en enquêtant sur place avec des rencontres, des interviews, des photos. Les déplacements, innombrables, proches ou lointains, me nourrissent en repérages. J’ai des carnets de notes, des calepins, des pense-bêtes, un peu partout dans les lieux où je passe et dans les vêtements que je porte. J’ai des bouts de dialogue griffonnés sur des feuilles volantes. J’ai même des croquis rudimentaires, sans compter des schémas narratifs, des « chemins de fer » page par page, etc. Je fais ensuite un synopsis plus ou moins développé en fonction de la personnalité du dessinateur : un proche ou — au contraire — quelqu’un avec qui je n’ai jamais travaillé ; un vieux briscard expérimenté dans le découpage ou — au contraire — un débutant qu’il faut guider avec précision. Vient alors le moment de l’écriture proprement dite, à l’ordinateur, un instrument qui a changé ma vie après m’avoir fait beaucoup souffrir mais à l’égard duquel je reste méfiant, n’ayant aucune maîtrise des choses techniques. Et là, ah là, quand tout va bien, quand je suis vraiment prêt, c’est le bonheur pur ! Tout sort à toute vitesse, les personnages parlent d’eux-mêmes avec leur langage propre, je sais exactement où se trouvent tous les protagonistes de l’histoire, j’anticipe dans des récits parfois complexes avec des intrigues parallèles où et quand ils vont ressortir. Je ne devrais peut-être pas l’avouer ? Mais il m’est arrivé d’écrire des albums entiers en quelques jours, non-stop, café mais pas de cigarettes ni d’alcool. J’en ressors épuisé et heureux. Beaucoup d’autres livres, en revanche, ont connu une naissance dans la douleur, pour des raisons parfois aujourd’hui encore opaques à mes yeux. Le plus curieux, c’est qu’un livre ayant souffert peut être plus réussi qu’un livre venu tout seul…